La force est Une. La force est Nous.
Apprends bien tes leçons.
La famille doit encore dîner dehors, ils sortent souvent ces temps-ci pensent-ils. Et d'après ce qu'ils ont compris c'est parce que leur famille est très respectée et aimée. Maman les regarde et leurs sourit, elle semble d'excellente humeur ce soir, comme tout les membres de la famille. Mais eux, ils n'aiment pas trop sortir, sentir tout ces regards sur eux, sentir qu'on ne comprends pas trop ce que fait ce drôle d'animal avec ce petit blond tout maigre perdu dans cette famille aussi rousse qu'imposante.
Ils frissonnent en pensant que ce soir encore, après l'appétissant repas, ils se feront encore embêter. Ils se feront encore traiter de « bâtards » et « d'illégitimes », ils se serrent l'un contre l'autre, unissant leurs forces pour ne pas se sentir si faibles. Ils feront face ce soir, papa et maman n'en sauront jamais rien. «
Alwyn ! Dépêche-toi mon petit ! » Le presse maman d'une voix autoritaire et douce à la fois qu'ils s'empressent de rejoindre. Ils saisissent la main de maman et leurs regards se posent sur le ventre si rond, si gros de maman. On dirait qu'il va exploser pensent-ils mi-inquiets, mi-amusés.
Ils finissent par tous arriver devant l'immense bâtisse qui les accueille ce soir et ils se sentent fiers d'être invités dans cette grande, si grande maison. Plus grande que la leur d'ailleurs. Ils restent derrière maman, protégés dans ses jupons, papa et maman se tiennent droits devant eux, fiers et le regard pétillant. Une porte s'ouvre, faisant arriver la chaleur jusqu'à leurs joues rougies par le froid. Une voix tonnant par dessus le vent givré qui souffle.
«
Lothar ! Yseult ! »
Les parents les entraînent à leur suite et lorsqu'ils passent le seuil de la porte la chaleur les enveloppe comme une seconde peau protectrice. Ils sentent leurs membres gelés se réchauffer un peu et ils se sentent un peu mieux. Jusqu'à entendre des rire d'enfants, des rire d'enfants qui les font cauchemarder. Jusqu'à tard dans la nuit.
«
Papa et maman n'ont rien à craindre de ces gens, ce sont des adultes, nous nous devons craindre, craindre les enfants. Ce sont les pires! Nous devons vitre grandir Bao... la pensée du petit garçon ne fait qu'un avec celle de son petit panda roux et celui-ci vient nicher son petit museau dans le creux de son cou.
Bientôt petit homme je serais assez grande pour te protéger, bientôt petit homme tu seras assez grand pour tous leur mettre une raclée ! Maman s’accroupit devant eux et leurs caresse les cheveux, ses beaux yeux verts se plongent dans les leurs.
«
Tout ira bien ? Je peux te laisser avec les autres enfants ? » Demande maman sur un ton un peu étrange et pendant une seconde on dirait qu'elle sait tout. Qu'elle sait ce qu'ils endurent et ce qu'ils taisent pour ne pas faire honte à la famille. Pendant un battement de cils, ils voudraient tout lui dire et pleurer tellement ils ont peur. Mais on ne dira rien, jamais pensent-ils. «
Oui maman ! Amuse toi bien ! » Souris le petit homme, partant en courant comme s'il était excité de rejoindre les autres enfants.
Comme s'ils allaient être contents de se faire taper dessus, de se faire humilier. Ils respirent un grand coup, se rassurant encore un petit peu ; derrière cette porte les autres enfants rigolent, ils chahutent et ils se disent que ça serait vraiment bien que pour une fois on les laisse tranquilles... Mais ils savent bien que ça ne sera pas le cas.
Ils s'apprêtent à pousser la porte lorsque les rires s'arrêtent et que les voix des enfants se font plus timides. «
Tu dis n'importe quoi ! » Proteste une voix masculine, «
Tu dis vraiment n'importe quoi ! » Insiste t-elle, alors que le grognement d'un chien se fait entendre. «
Non c'est mon papa qui me l'a dit ! Le bâtard est plus riche que tout le monde ici ! Et même que sans son papa à lui et ben le tiens il aurait même pas de travail ! » Réplique une voix féminine qu'ils ne reconnaissent pas, mais ils savent qu'on parle d'eux ; « le bâtard » ça ne peut être qu'eux.
Ils froncent les sourcils et collent leurs oreilles contre la porte légèrement entrebâillée. «
Arrête ! Le bâtard c'est rien que le bâtard ! C'est moi le plus riche ici ! » Tonne encore le garçon qu'ils ont déjà entendu. «
Mes parents à moi ils m'ont aussi dit d'être gentil avec le bâ...Avec Alwyn, ils m'ont dit que je devais être gentil parce que leurs parents pourraient renverser le pays et qu'ils ont tellement d'argent qu'ils pourraient bien vouloir le partager avec d'autres. » Cette voix, ils la connaissent, c'est celle de Mathis, leur seul ami, celui qui se prend volontiers des coups pour les protéger. Même que son daemon, Lola, est une adorable labrador qui aime jouer avec Bao. Ils ne savent pas trop quoi penser, c'est un peu compliqué tout ce qu'ils entendent mais ils pensent comprendre... Si Mathis et Lola sont amis avec eux ce n'est pas parce qu'ils le veulent vraiment, mais parce qu'ils sont obligés.
Ils se sentent un peu mal d'avoir entendu ça et puis ils réfléchissent un peu pendant que les enfants sont en train de batailler sur le sujet.
S'ils sont si riches que ça, s'ils ont autant de pouvoir que ça, si même les parents disent aux enfants de se faire amis avec eux, ils sont donc un peu importants ?
Ils sourient, un peu, timides et pas surs d'eux mais plus les minutes passent, plus ils sont surs. Ils n'auront peut-être pas de vrais amis mais au moins ils ne se feront plus taper dessus. Non ! Ils ne se feront plus taper dessus ! Pensent-ils en souriant aux anges. La boule au ventre qu'ils ont disparaît comme par magie et ils poussent la porte d'un coup sec ; les regards se posent sur eux mais cette fois ils n'ont pas peur des insultes ou des coups. Cette fois ils savent qu'ils sont du côté des forts, des riches, des puissants.
Et cette leçon ils ne sont pas près de l'oublier.