2. CONTEXTE ✤ l'histoire de nos pas

  Connaissez vous la poussière ? Pas la poussière banale qui s'entasse en petit paquet sur le mobilier, non... La poussière qui régit notre monde. Autrefois, le monde n'était que poussière. Lorsque les hommes ont foulé la terre, lorsqu'ils sont devenus ce qu'ils sont aujourd'hui, la poussière s'est accrochée à eux comme un parasite. Elle a commencé par scinder leurs âmes puis, avec le temps, elle a su se matérialiser via les Dæmons, des manifestations animales de l'âme humaine. Durant de nombreuses années, l'humanité a vécu des heures de gloire et de prospérité : si les Hommes avaient des différents, ils étaient pourtant tous unis dans leur duplicité. L'Homme et le Dæmon. Le monde s'est ainsi formé, entre guerre et paix, unis par des nations jumelles qui parfois se déchiraient. Un monde en tout point semblable à tous les autres.

  Cependant, le savoir octroie souvent le pouvoir et ceux qui ont finalement mit le doigt sur la poussière l'ont diabolisée. La poussière était une maladie. On était malade de la poussière et, malheureusement, on ne guérissait pas autrement qu'en mourant. Plusieurs expériences terrifiantes sur l'Homme menèrent le monde à de nombreuses guerre idéologiques qui finissaient bien souvent en bain de sang. Mais les hommes avaient des armes et il ne s'agissait par juste de mots et de longs discours... Finalement, lorsque l'humanité vécu ses heures les plus sombres, elle décida de ne plus jamais recommencer. Plus d'expériences, plus de guerres, plus de génocides. Les hommes cohabiteraient entre eux tout comme les scientifiques cohabiteraient avec la poussière. Cependant, le mal était déjà fait.

  En Grande Bretagne, les scientifiques ne semblaient pas voir cela de cet œil. La poussière était bien trop trouble pour qu'on la laisse tranquille, et les expériences demeurèrent. Secrètes, évidemment, mais de moins en moins limitées par la morale, après tout, la poussière avait-elle la moindre éthique à nous rendre malade ? A nous laisser mourir ? Certainement pas. Guérir de la poussière, c'était s’octroyer la vie éternelle. Ou la mort éternelle, ils n'étaient pas encore tout à fait d'accord sur ce point. Si Hommes et Dæmons vivaient en paix ici, c'était aussi grâce à la Haute Autorité qui gérait toute la population anglaise d'une main de fer. Passer devant leur tribunal n'avait rien d'une partie de plaisir, et la peine de mort était souvent la sentence invoquée. Les lois étaient dures mais l'ordre devait régner à tout prix. Et le prix était souvent élevé.

  Il y a plus de sept ans, alors que la Grande Bretagne avait quitté la guerre, des événements étranges ont eu lieu, tant par la forme que par le fond. Les « Excors » ou Sans-cœur ont commencé à apparaître dans la banlieue Londonienne. Ils ressemblaient en tout point aux autres Hommes, si ce n'est qu'ils n'avaient pas de dæmon, pas parce qu'ils en avaient jamais eu, mais parce qu'ils n'en avaient plus. Du jour au lendemain, leur dæmon n'avait plus donné signe de vie. Vidés, terrifiés, brisés, ils ne savaient plus tracer un chemin dans leur propre vie. Évidemment, un phénomène comme celui-ci voulu être médiatisé mais c'est là que les événements virèrent au « vraiment louche »... En effet, la Haute Autorité filtrait tout communiqué de presse relevant du phénomène Excors. Au contraire, ils entretenaient même la peur et le doute en isolant un maximum ce qu'on surnommait parfois les « sous-hommes ». Les communications qui sortaient du pays étaient épiées, le pays tout entier était en quarantaine... L'émigration clandestine des Excors était compliquée mais se faisait de plus en plus, même si la plupart de ceux-ci étaient trop perdus pour décider de partir. Ils avaient perdu une moitié d'eux, et on essayait même de les priver de leur moindre parcelle d'humanité...

  Aujourd'hui, le pays est encore fermé et les Sentinelles de la Haute Autorité de Londres exercent une pression terrifiante sur les habitants. Tout comportement suspect est puni. Toute information doit être transmise aux grandes instances et la liste des choses à faire et ne pas faire n'a plus le moindre sens. Si les Dæmonistes tentent de garder la tête hors de l'eau, les Excors cherchent à se faire une petite place dans un monde qui semble à présent terrifié par le moindre soupçon de chaos, mais... La poussière est l'essence même du chaos. Et la poussière régit le monde...